Non, il n’y a pas eu de neige à Noël…
Bien heureusement, la neige est annoncée pour ce samedi matin 27 décembre, et même en plaine !
Il faut s’en réjouir. Un hiver sans froid, sans neige, et je suis tout désappointé.
Plus encore, la végétation et les animaux de notre région sont adaptés à cette venue. Froid et neige sont nécessaires au cycle de vie de notre environnement alpin, flore et faune.
C’est aussi un plaisir visuel, cette transfiguration de nos paysages, magnifiés par cette poudrée de blanc.
Manne qui va permettre enfin aux sports d’hiver de prendre toute leur place.
Mais force est de constater la complète dérive de la politique économique de nos stations et la démesure des aménagements en cours.
Les médias rappellent régulièrement que l’objectif fixé aux accords climatiques à construire n’est pas d’empêcher le réchauffement de notre climat (Plus possible !), mais de le limiter à + 2° d’ici la fin du siècle.
Objectif qui demande engagements et politiques coordonnées à l’échelle mondiale, lors des rencontres internationales sur le climat (nommées COP, dans la lignée du protocole de Kyoto).
La COP N°19, à Copenhague en 2013, a été un grave échec, les pays ne s’accordant pas pour créer une dynamique en faveur de la préservation de notre climat. La COP 20, qui vient d’avoir lieu à Lima, était limitée à la préparation de la COP 21 qui aura lieu en décembre 2015, à Paris, et qui sera le vrai rendez-vous si on ne veut pas rater le virage essentiel à donner avant 2020 aux économies de tous les pays pour préserver notre éco-système.
Ce 18 décembre, lors de la commission locale de l’eau du SAGE de l’Arve, j’ai assisté à une présentation par une représentante de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse du travail de cet organisme. La question du réchauffement climatique en cours y fut rapidement évoquée. On sait que les perspectives sont différentes, concernant la hausse des températures, suivant les zones du globe. En France même, les régions seront affectées différemment : tout l’arc alpin serait davantage frappé, les études menées en Suisse, en Autriche et en France étant convergentes. Pour l’ensemble du bassin Rhône-Méditerranée, c’est une prévision allant de +3° à +5° qui nous a été évoquée et ce dès 2080, et non pas 2100 comme repère ! D’une manière générale, tous les responsables de l’eau sont inquiets pour la ressource sur une vision à 20 ans de maintenant. Ici, une part importante de notre ressource en eau, elle tombe notamment sous forme de neige, se stocke en glace, une réserve essentielle qui se libère en partie au printemps et à l’été. Le changement climatique est une question suivie par l’agence de l’eau : ici, des documents. |
Or je constate, avec d’autres, la fuite en avant de nos stations de ski, qui se cachent les yeux devant la propre fabrication de leur perte, et rendent non durable le modèle de l’économie de la montagne en Pays de Savoie. Elles font venir des centaines de milliers de personnes qui consomment beaucoup d’eau à un moment de l’année où elle est moins mobilisable dans notre région.
Quelques exemples éclatants :
- Canons à neige
Comme l’indiquaient des copains, la situation de décembre 2014 est frappante car il faut des températures négatives pour produire la neige : « ce qui est nouveau, c’est que, pour la première fois, le suréquipement en canons à neige censé protéger les stations du risque de manque de neige n’a pas suffi…. il a même été inutile : l’automne exceptionnellement chaud n’a pas permis de produire de la neige artificielle.»
- Ski la nuit !
C’est une station de Haute-Savoie, Manigod, qui vient de faire un investissement complètement déraisonnable au regard des enjeux climatiques : 1 million d’euros pour du ski de nuit, via des canons à neige (enneigeurs, dit-on en douce appellation orwellienne) et de l’éclairage : 64 projecteurs, bonne nuit la sobriété énergétique ! Quel effarement de constater le développement de cette pratique nocturne de plein air ! Y a -t-il quelqu’un qui réfléchit autrement qu’avec un tiroir caisse branché sur 5 ans ?
- Ségrégation du droit d’usage
Ça, c’est la nouveauté arrivée en 2014 : compte tenu du peu de stations susceptibles d’ouvrir, pour les quelques stations ouvertes cette première semaine de vacances, des quotas de skieurs ont été instaurés : à Avoriaz notamment ou à Courchevel et St Jean-de-Belleville (voir D.L. ci-contre) :
Avec priorité à ceux qui prenaient des cours ESF, ceux qui venaient de l’extérieur. Quand aux locaux, ben …, pas la peine de se présenter aux caisses, il n’y avait plus de forfaits pour eux !
C’est un renversement complet de l’histoire de la base économique de nos stations, construites avec la population de la commune et du reste des Savoie, tout en s’ouvrant toujours davantage à l’extérieur : des lyonnais aux parisiens et ensuite, à toute la planète. C’est sacrifier l’effort fait pour garder des praticiens locaux, dans les écoles, les clubs de ski.
Il reste aux savoyards à regarder les touristes racler l’herbe blanchie. Misère ! Ce quota de skieurs, cette exclusion de chez soi, c’est une grave faute éthique et patrimoniale.
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Yves Paccalet écrivait récemment : « nous perdons, en tendance, chaque année un jour d’enneigement et un centimètre d’épaisseur cumulée d’eau en cristaux. Cela semble minime à ceux qui ne regardent que le bout de leur nez : mais un jour par an, en trente ans, cela fait un mois, soit plus du quart de la saison actuelle ! »
Nous devrions maintenir un équilibre plus naturel en proposant aux touristes des activités liées à la découverte de ce qui peut rester d’authentique en Pays de Savoie.
Et admirer la neige et en profiter, quand elle arrive enfin.