La représentation des animaux et de l’être humain est une donnée très ancienne de l’humanité. J’ai hâte de pouvoir visiter la réplique de la grotte Chauvet : il y a 30 000 ans, un tel talent pour figurer des lionnes sur un rocher et les représenter en mouvement force l’admiration. La figuration humaine est certes rare à la préhistoire mais elle s’est développée ensuite, de l’Asie à l’Afrique, de l’Europe aux Amériques.
Le dessin, la peinture, la sculpture, sur tous les continents, sont des formes majeures d’expression.
La caricature, ce dessin détourné de la stricte représentation du réel, pour porter un message ou une idée, est une très ancienne tradition, notamment en France.
J’ai travaillé la semaine passée pour donner une animation aux dessins de Honoré Daumier, les poires (1831) : il y caricaturait le physique du roi Louis-Philippe. Qui comme tous les souverains, avait reçu l’onction de l’Eglise et donc un peu du pouvoir divin.
Mes ancêtres n’étaient pas français à cette période historique, pas plus que tous les savoyards-savoisiens. Mais, lors de mon parcours scolaire, au collège, il y avait dans mon manuel la reproduction de ces dessins de l’Histoire de France : je me souviens de mon étonnement que l’on puisse publier, à l’époque, une telle attaque du souverain français.
Et H. Daumier, à l’incroyable talent, avait réalisé auparavant un autre dessin contre le roi, satire beaucoup plus politique et indignée, qui lui valut 6 mois de prison ! Voir ici, le roi en Gargantua, oppresseur de son peuple.
Le monde musulman, dit-on actuellement, ne permet pas la représentation du prophète Mohammad. C’est un point litigieux et des analyses y ont été consacrées dans divers médias :
- par de savants bibliothécaires
- par un journaliste du Monde
- par des spécialistes du Proche Orient, IFPO
En tous cas, les représentations d’humains et d’animaux sont interdites pour les monuments religieux et dans l’architecture mais, dans l’espace séculaire, des représentations ont fleuri dans pratiquement toutes les cultures islamiques. Et même pour y délivrer un message religieux. Voir ce site
Cela fait penser aux calligrammes poétiques, notamment ceux cultivés par Apollinaire.
Le dessin, la calligraphie, c’est la Vie. Hein, Charlie !
Dans ses rapports compliqués à la religion, le fanatisme destructeur s’exprime à plein en ce moment.
La culture française, ces siècles d’affrontement religieux entre catholiques et protestants, tragédies qui ont aussi touché la Savoie, ont conduit à poser la liberté de pensée comme essentielle, avec le respect des lieux dédiés aux différents cultes et le respect de la liberté de l’espace séculaire et démocratique (presse, notamment), au complet.
D’ailleurs, l’humanité et l’intelligence conduisent à ce qu’un texte doive toujours être interprété et confronté à d’autres interprétations.
Deux femmes ont été massacrées lors des assassinats fanatico-islamistes de ce début janvier : l’une, tuée à cause de son uniforme de policière.
L’autre, tuée car elle était dans la rédaction de Charlie, une psychanaliste qui y rédigeait deux fois par mois une chronique.
J’ai découvert le texte prononcé à ses funérailles.
Elsa Cayat était juive et c’est une femme, rabbin, qui s’est exprimée à ce dernier moment, s’appuyant sur une parabole remarquable. Prenez le temps de la lire :
Un proverbe arabe dit :
« Ce qui visible est à nous, ce qui est caché est à Dieu ».
Occupons nous, ensemble et divers, de gérer le monde visible.